Le Collège des Producteurs, l’Association wallonne des éleveurs et l’Apaq-w se sont associés pour organiser une conférence à destination des étudiants (agro et vétérinaires), qui s’est déroulée le 23 avril à Louvain-la-Neuve et le 24 avril à Namur. Retour sur cette première.
L’élevage et la consommation de produits animaux dans l’histoire : défense et promotion de l’élevage paysan
Paul ARIES, Essayiste et politologue français spécialiste de l’alimentation a commencé la séance en explorant l’évolution du rapport humain à l’alimentation, en particulier à la viande, à travers les âges, mettant en lumière les dimensions politiques, sociales et environnementales de cette relation complexe.
Quelques notions majeures retenues de son discours :
- Polémique actuelle sur la consommation de viande: Paul Ariès souligne que la focalisation actuelle sur la consommation de viande est sujette à débat, avec des opinions divergentes quant à sa légitimité et à ses implications.
- Complexité de l’acte alimentaire: L’acte alimentaire implique souvent l’incorporation de substances étrangères à notre corps, ce qui rend la consommation d’aliments et de viande en particulier , encore plus compliquée.
- Liberté de choix alimentaire: Ariès défend le droit individuel de choisir de consommer ou non des produits animaux, mais critique l’imposition de ces choix sur autrui.
- Distinction entre production industrielle et élevage paysan: Il distingue l’élevage paysan de la production industrielle de viande, soulignant les différences fondamentales entre les deux approches et leurs impacts écologiques.
- Évolution historique de la consommation de viande: Ariès explore l’évolution de la consommation de viande depuis les ancêtres végétariens jusqu’à l’importance croissante de la viande dans l’alimentation humaine, influençant même la taille du cerveau.
- Dimension politique de l’alimentation: Il met en lumière la dimension politique de l’acte de manger, depuis les traditions de partage dans l’Égypte antique jusqu’aux restrictions sociales imposées par la table romaine.
- Débats contemporains sur la consommation de viande: Ariès aborde les débats modernes, y compris les préoccupations environnementales, la santé publique et les alternatives à la viande, tels que les produits d’origine végétale. Il questionne et remet en question la vision des tenants de l’agriculteurs cellulaire et l’agriculture urbaine qui pour lui sont en dehors des réalités écologiques et agricoles. Ces modèles hors sols sont une drôle de conception de notre relation au vivant et ne serons pas à même de nous nourrir demain.
- Réflexion sur l’élevage et l’écologie: Il remet en question l’idée selon laquelle l’élevage est intrinsèquement anti-écologique, soulignant la complexité des émissions de gaz à effet de serre et l’importance des pratiques agricoles vertueuses.
L’intervention de Paul Ariès a livré une vision nuancée de l’évolution du rapport humain à la viande et à l’alimentation, mettant en lumière les multiples dimensions historiques, culturelles et environnementales de cette relation complexe. Sa réflexion invite à une prise de conscience des enjeux actuels liés à la consommation de viande tout en encourageant un dialogue ouvert et respectueux sur ces questions cruciales. L’opposition n’étant pas entre protéines végétales et animales mais entre agriculture paysanne et productions alimentaires industrielles.
Pour aller plus loin :
Lire l’article du Sillon Belge qui détaille pleinement les propos de Paul ARIES et sa vision :
« On ne peut croire en une agriculture sans élevage, prélude à une alimentation sans agriculture »
Faut-il vraiment réduire l’élevage bovin pour sauver la planète ?
Après cette intervention, c’est Nicolas PERREAUX, Vétérinaire et spécialiste de la filière viande bovine qui a présenté les conclusions de travail de fin d’études portant sur « l’impact carbone de la viande bovine wallonne en circuit court en comparaison avec les viandes étrangères fréquemment importées ». La réduction de la consommation de viande est une des grandes mesures qui revient fréquemment dans l’espace médiatique pour limiter le réchauffement climatique. Est-ce réellement pertinent ? Voici l’angle choisi par l’orateur…
Dans son raisonnement, en réalisant une analyse du cycle de vie (en prenant en compte toutes les étapes, y compris la consommation d’énergie et les rendements), Perreaux a démontré que l’élevage bovin émet environ 15 kg de CO2 par kilo de carcasse dans notre région. Il a ensuite comparé ce chiffre à la littérature disponible pour différentes productions de viande bovine, telles que le bœuf irlandais et le bœuf sud-américain, soulignant l’importance de ne pas généraliser et de reconnaître les variations entre les différents systèmes d’élevage.
Perreaux a également souligné divers facteurs qui influent sur les émissions de gaz à effet de serre, notamment la fermentation entérique, les caractéristiques zootechniques, la conduite du troupeau et la variabilité génétique des animaux. Il a insisté sur le fait qu’il existe des élevages vertueux ainsi que des élevages moins respectueux de l’environnement, et que ces nuances doivent être prises en compte dans les discussions sur l’impact de l’élevage sur le climat.
Nicolas Perreaux a mis en lumière le rôle crucial des prairies permanentes dans la captation du carbone, soulignant leur importance en tant qu’enjeu majeur pour l’atténuation des changements climatiques.
Les éleveurs comme meilleurs ambassadeurs des réalités de l’élevage
En clôture de séance, ce sont Firmin BAUDUIN et Sophie MARCHAL, tous deux éleveurs de bovins, qui sont venus raconter quelques instants de leur journée en tant qu’agriculteurs ; de partager leurs doutes, inquiétudes pour l’avenir ; de confier les injustices qu’ils ressentent ; mais surtout de livrer des témoignages inspirants et authentiques ce qui les pousse à se lever tous les matins pour s’occuper de leurs animaux et sur la place de l’élevage et des éleveurs dans notre société.
Pour en savoir plus ou consulter les présentations des orateurs, contactez Quentin Legrand, chargé de mission Viande Bovine.