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Evaluation de l’impact environnemental de différents élevages bovins wallons sur la qualité de l’eau et la biodiversité

L’Université de Liège (Faculté de Médecine Vétérinaire) mène un projet subventionné par la Région Wallonne qui vise à évaluer l’impact environnemental de différents élevages bovins wallons sur la qualité de l’eau et la biodiversité. Ce projet a pour but de réaliser 160 diagnostics environnementaux sur une période de deux ans en Wallonie et d’apporter des conseils personnalisés aux éleveurs. Ces diagnostics environnementaux concernent les éleveurs de bovins (lait ou viande) intéressés de connaitre leur impact environnemental et de vouloir l’améliorer dans le futur.

Selon l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), les filières de l’élevage émettent 14,5 % des gaz à effets de serre émis par les activités humaines. Cela représente environ 60 % des émissions de gaz à effets de serre du secteur agricole et forestier. Ce chiffre comprend les émissions de l’ensemble de la filière, depuis la production des aliments en amont jusqu’à la fabrication et le transport des produits alimentaires en aval.

En Wallonie, en 2016, l’agriculture (élevage et cultures) représentait 13 % des émissions atmosphériques de GES (SPW-AwAC, 2018). L’élevage est une composante importante dans le paysage agricole wallon. En 2019, les prairies et les cultures fourragères représentaient 56% de la surface agricole en Wallonie (Chiffres clés de l’agriculture 2020).

La tendance au réchauffement climatique est due à la production des GES, en particulier le dioxyde de carbone (CO2), le méthane (CH4) et le protoxyde d’azote (N2O). L’activité agricole est surtout concernée par la production de CH4 et de N2O.

Dans ce contexte il y a une demande des consommateurs, mais aussi des réglementations et certifications, pour que les agriculteurs puissent mesurer l’impact de leurs pratiques agricoles et en assurer un suivi (Whitehead, 2016).

Qu’est-ce qu’un diagnostic environnemental ?

Un diagnostic environnemental est réalisé avec un outil basé sur la méthodologie de l’Analyse Cycle de Vie (ACV) à l’échelle de l’exploitation agricole. L’outil permet un calcul automatisé des performances environnementales en élevage de ruminants, donnant lieu à un bilan des émissions en gaz à effets de serre (GES – protoxyde d’azote, méthane, dioxyde de carbone) de l’exploitation et à une empreinte carbone du produit (lait ou viande).
L’outil apporte également des données sur la contribution au maintien de la biodiversité et l’impact sur la qualité de l’eau. Le maintien de la biodiversité tient compte notamment de la présence de haies et de prairies (particulièrement les permanentes) dans l’élevage. L’impact sur la qualité de l’eau est mesuré par estimation de l’azote lessivé à partir du bilan apparent en azote (entrées – sorties). Le logiciel positionne ainsi l’exploitation par rapport à des valeurs repères. Le stockage de carbone, la performance nourricière ainsi que les consommations d’énergies sont également évalués. Le calcul de la performance nourricière permet de quantifier le nombre de personnes que peut alimenter l’exploitation en protéines animales, information gratifiante pour l’agriculteur.

Plusieurs outils sont disponibles actuellement pour réaliser un diagnostic environnemental d’une exploitation, notamment l’outil DECiDE développé par le Centre wallon de Recherches Agronomiques (CRA-w) et l’outil français certifié CAP’2ER, développé par l’Institut de l’Elevage (Idele).

Les figures ci-dessous présentent des exemples de diagnostics environnementaux réalisés avec CAP’2ER et DECiDE. Les deux outils peuvent donner des résultats sensiblement différents mais qui vont dans la même direction.

Cette exploitation émet 12 210 kg eq. CO2/ha SAU et stocke 1 050 kg eq. CO2/ha SAU. Il y a donc une compensation de 8,6% de carbone. Des pertes en azote sont observées vers l’air mais aussi vers l’eau.


Figure 1: Visuel d’un diagnostic environnemental avec CAP’2ER de la ferme du CTA de Strée en 2019

On observe ici un excédent d’azote important. Les causes sont surtout au niveau de l’azote contenu dans les concentrés achetés et les engrais minéraux. En effet, on observe qu’il y a moins d’azote qui sort sous forme de lait et donc que de l’azote est perdu.


Figure 2: Visuel d’un diagnostic environnemental avec CAP’2ER de la ferme du CTA de Strée en 2019

L’atelier lait est à chaque fois comparé à la référence qui est dans le même système que l’exploitation. Cela permet de comparer des fermes avec des ateliers lait ou viande comparables


Figure 3: Visuel d’un diagnostic environnemental avec CAP’2ER de la ferme du CTA de Strée en 2019

Les émissions de CH4 et de N2O sont décrites.
La séquestration de carbone ici est majoritairement due aux prairies.


Figure 4: Visuel d’un diagnostic environnemental avec Decide de la ferme du CTA de Strée en 2020

Les différents postes d’émissions sont décrits ici.


Figure 5: Visuel d’un diagnostic environnemental avec Decide de la ferme du CTA de Strée en 2020

Les émissions sont exprimées par litre de lait corrigé pour que toutes les exploitations soient comparées avec la même échelle.


Figure 6: Visuel d’un diagnostic environnemental avec Decide de la ferme du CTA de Strée en 2020


Une prise de données par un conseiller est réalisée via une interview chez l’agriculteur. Elle dure entre 2 et 3 heures environ.

Les données récoltées sont nombreuses et se répartissent en :

  • Données générales sur la ferme (ferme laitière/viandeuse, bio ou conventionnelle, …)
  • Données de troupeau(x) (effectif, analyse du lait, …)
  • Logements et effluents (durée de la présence en bâtiment, type de logements, …)
  • Surfaces (ha prairies, cultures, fertilisation, éléments agro-écologiques, …)
  • Alimentation (quantités d’aliments achetés, ration, …)
  • Énergies (électricité, carburant, travaux effectués, production d’énergie renouvelable, …)

Une fois que les données sont récoltées, le conseiller va pouvoir analyser ces données et les encodées dans des outils tels que CAP’2ER ou DECiDE. Dans le cadre du projet de l’Université de Liège, les deux outils sont utilisés.

Le conseiller revient une fois de plus chez l’agriculteur pour lui présenter ses résultats et lui proposer un conseil adapté à son exploitation.

Le diagnostic est réalisé pour une année. Il peut être intéressant de répéter l’exercice plusieurs années d’affilées pour observer les évolutions en fonction des pratiques qui évoluent sur la ferme.

Les conseils qui peuvent être apportés grâce au diagnostic

Les conseils apportés sont personnalisés, une exploitation n’est pas une autre ! Les conseils sont variés, ils concernent aussi bien la gestion de l’alimentation du troupeau, que la gestion de la fertilisation des terres, ou encore, l’optimisation de l’âge au premier vêlage.

Le projet Life Beef Carbon ayant réalisé environ 2000 diagnostics CAP’2ER dans des élevages de bovin viande en France, a déjà souligné les principaux leviers d’action pour diminuer l’empreinte carbone des élevages de viande bovine :

  • L’optimisation des techniques d’élevage (conduite du troupeau, limitation des animaux improductifs, …) ;
  • La valorisation des fumiers et lisiers et la gestion des effluents ;
  • Le stockage de carbone dans le sol et dans la biomasse (implantation de haies, …) ;
  • Et l’amélioration de l’autonomie fourragère (allongement de la durée de pâturage, …) !

Les raisons de réaliser un diagnostic environnemental

L’éleveur peut selon sa situation trouver plusieurs intérêts à réaliser un diagnostic environnemental :

  • Comprendre au mieux son exploitation et ses impacts positifs et négatifs sur l’environnement, les deux coexistant dans une ferme
  • Recevoir un conseil personnalisé vers de meilleurs pratiques environnementales en identifiant des leviers d’amélioration de la ferme
  • Utiliser le diagnostic environnemental pour expliquer et communiquer l’impact environnemental de sa ferme (ex : vente directe à la ferme, ferme pédagogique, …)

Conclusion

Si vous êtes intéressé par des renseignements sur le projet ou vous voulez réaliser le diagnostic environnemental de votre exploitation, vous pouvez contacter Julie Hurdebise (Université de Liège) à l’adresse jhurdebise@uliege.be.

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