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Le métier d’agriculteur face au défi de la rentabilité

Le Comité économique et social européen (CESE) a publié en juillet un avis de 13 pages relatif au sujet : « Le métier d’agriculteur face au défi de la rentabilité ».  

Le CESE a ainsi voulu souligner l’importance du rôle des agriculteurs européens, leur contribution à l’économie de l’UE ainsi qu’à la sécurité alimentaire mondiale. Ce rapport établit des constats et apporte des recommandations.

Le rapport peut être consulté dans son eniereté via ce lien : https://www.eesc.europa.eu/fr/our-work/opinions-information-reports/opinions/le-metier-dagriculteur-face-au-defi-de-la-rentabilite-avis-dinitiative

Points « positifs »

  • le secteur agricole de l’UE joue un rôle crucial dans les économies rurales et produit des aliments de qualité qui respectent les normes les plus élevées au monde.
  • Le secteur offre aux consommateurs une sécurité alimentaire face à la pression croissante exercée par le changement climatique et aux exigences sociétales en matière de durabilité environnementale.
  •   Le secteur est l’un des principaux pourvoyeurs d’emplois: La filière agroalimentaire est l’un des plus grands secteurs économiques de l’UE: employant quelque 40 millions de personnes, elle permet à la croissance et à l’emploi de se maintenir et de se développer. Environ 10 millions de personnes sont employées directement et travaillent dans des exploitations et des coopératives agricoles.
  • Les agriculteurs contribuent à l’économie européenne dans son ensemble. Selon Eurostat, en 2017, le secteur agricole représentait 1,2 % du PIB de l’UE et a créé une valeur ajoutée (brute) de 188,5 milliards d’EUR; les 137 milliards d’EUR d’exportations agricoles réalisés sur cette période ont activement contribué à l’excédent commercial de l’Union.
  •   Le secteur agricole de l’UE est à la pointe de la révolution technologique et numérique et contribue à de nombreuses avancées dans le domaine de la génétique, des véhicules automatisés, des robots, des drones, de l’imagerie par satellite, de la télédétection, des mégadonnées, etc.
  • En termes réels, les prix (déflatés) de la plupart des principaux produits étaient plus élevés en 2017 que l’année précédente: le prix moyen du lait a grimpé de 17,1 % par rapport à 2016, les prix du porc ont augmenté de 8,3 %, ceux des céréales de 3,0 %, ceux des bovins de 2,2 %, tandis que les prix de la volaille augmentaient également (+ 1,0 %). Cette évolution positive de la plupart des produits de base s’inscrit dans la phase d’expansion amorcée en 2003 (toutefois, en 2008, une forte baisse des prix a eu lieu, entraînant une volatilité des prix sur le marché international qui a mis en péril les petits et moyens agriculteurs de l’UE ainsi que les investisseurs).

Points négatifs

  • La rentabilité et la viabilité économique des exploitations agricoles représentent un grave problème dans l’Union européenne, où le revenu d’un agriculteur ne représente en moyenne que 46,5 % de celui des autres secteurs de l’économie. Le revenu agricole par unité de travail annuel (UTA) pour l’EU-28, exprimé en indice, était en 2017 de 10,9 % supérieur à celui de 2016. Cette évolution doit toutefois être mise en parallèle avec d’autres secteurs économiques où le revenu moyen est beaucoup plus élevé. De fait, par rapport aux salaires moyens dans l’économie, le revenu d’entreprise d’un agriculteur par unité de travail familial ne s’élevait qu’à 46,5 % en 2017.
  • Le secteur agricole de l’UE fournit des services publics et des externalités positives qui ne sont pas reconnus par le marché.
  • On assiste à l’émergence de nouveaux défis tels que le changement climatique, une plus grande volatilité des prix associée à des pratiques commerciales déloyales, le dépeuplement des zones rurales, ainsi que le vieillissement de la population agricole, qui mettent les agriculteurs européens en difficulté sur le marché international.  Le marché unique de l’UE est le marché le plus ouvert et le plus accessible au monde, ce qui place les agriculteurs de l’UE dans une difficile situation de concurrence face à des produits agricoles importés qui sont soumis à des normes de production différentes. Toutefois, la traçabilité des produits alimentaires provenant de pays tiers est encore perfectible.
  • Selon la Commission européenne, sur les 10,5 millions d’exploitations de l’UE, sept exploitants agricoles sur dix (71,5 %) étaient des hommes et une majorité (57,9 %) était âgée de 55 ans ou plus. Seul un exploitant sur dix (10,6 %) était un jeune agriculteur âgé de moins de 40 ans et cette proportion était encore plus faible chez les agricultrices (8,6 %). Le vieillissement des agriculteurs entraîne un dépeuplement généralisé des zones rurales. les nouvelles générations sont découragées de reprendre l’exploitation familiale en raison de la faible rentabilité de l’activité agricole et des difficultés d’accès aux terres.
  • Selon la fiche d’information de la Commission de 2017, la répartition de la valeur ajoutée dans la chaîne alimentaire est d’environ 25 % pour l’agriculteur, de 25 % pour la transformation des denrées alimentaires et de 50 % pour le commerce de détail alimentaire et les services de restauration. Les étapes de transformation et de vente ont accru leur valeur ajoutée totale dans la chaîne alimentaire en suivant l’augmentation de la demande des consommateurs pour des produits prêts à l’emploi. Dans le même temps, la valeur ajoutée de l’agriculture a diminué à partir de 2014 (de 4 % en 2016). Cela est dû à la hausse des coûts des intrants du fait de la concurrence pour les ressources rares ainsi qu’aux possibilités limitées dont disposent les agriculteurs pour ajouter de la valeur au produit de base ou pour obtenir une rémunération.

Recommandations

  •  L’Union a besoin d’une chaîne d’approvisionnement alimentaire équitable, transparente et qui fonctionne bien, qui bénéficie aux agriculteurs et à toutes les parties prenantes, y compris les entreprises de transformation de produits alimentaires, les détaillants et, surtout, les consommateurs.
  • Au niveau national, il y a lieu d’envisager une approche inversée de la négociation sur le marché, axée sur la mise en place de chaînes de valeur visant à offrir aux agriculteurs un revenu mensuel équivalant à deux fois le salaire minimum. Il s’impose de respecter rigoureusement la directive européenne relative aux pratiques commerciales déloyales.
  • Les nouvelles technologies, associées aux activités de recherche et d’innovation, constituent une partie de la solution lorsqu’il s’agit de maintenir la compétitivité du secteur agricole de l’UE et de permettre aux agriculteurs européens de s’attaquer directement et efficacement à la question du développement durable. L’accès au financement est essentiel pour permettre aux agriculteurs de déployer des solutions technologiques innovantes dans leurs exploitations. À cet égard, la fonction de subsidiarité du deuxième pilier de la PAC doit être préservée et promue dans le cadre de la nouvelle PAC. Les nouvelles technologies aident les agriculteurs de l’UE à garantir la sécurité alimentaire. Elles permettent de s’attaquer directement et  efficacement à la question de l’environnement comme la réduction des produits phytopharmaceutiques.
  • L’éducation et la formation tout au long de la vie et le développement des compétences sont nécessaires pour donner aux agriculteurs de l’UE les instruments adéquats qui leur permettront de mieux exploiter le potentiel technologique et d’utiliser des solutions innovantes dans leurs exploitations.
  • Les mesures environnementales ne devraient pas menacer la sécurité alimentaire et doivent tenir compte du fait qu’il faut rémunérer les agriculteurs de manière équitable pour le surcroît de travail qu’induisent souvent les mesures en faveur d’un développement durable et les mesures d’atténuation.
  • Une Union forte doit chercher à atteindre les objectifs du traité de Lisbonne mais aussi des objectifs mondiaux tels que l’accord de Paris sur le climat et les objectifs de développement durable des Nations unies. Il est important de noter que l’accord de Paris et les objectifs de développement durable fixent des objectifs importants pour le secteur agricole de l’UE, qui doivent être atteints entre 2030 et 2050. Les agriculteurs de l’UE sont prêts à relever ces défis pour autant qu’ils soient dotés des outils adéquats. La «boîte à outils» doit comporter un cadre politique positif et d’application simple, de nouvelles technologies, des stratégies de gestion de l’eau (stockage et irrigation) et un budget solide pour la PAC qui soutienne les efforts supplémentaires des agriculteurs. Priver les agriculteurs de l’un des instruments précités pourrait mettre en péril la sécurité alimentaire et nuire à la qualité de la production alimentaire de l’UE.
  • L’agriculture est entrée dans l’ère de la numérisation. L’utilisation de mégadonnées pourrait aider les agriculteurs à s’engager dans l’avenir de l’agriculture. La collecte et l’utilisation de données dans le domaine agricole ne constituent pas un concept nouveau. Ce qui est nouveau, c’est la possibilité de développer un secteur agricole axé sur les données grâce à la taille et au volume de ces dernières, lesquelles connaissent une croissance exponentielle. La propriété des données et le droit de déterminer qui peut y accéder et les utiliser sont des éléments essentiels pour permettre aux agriculteurs de continuer à participer à la mise en œuvre des nouvelles technologies. Il n’existe à l’heure actuelle aucun cadre commun fournissant des explications claires sur la propriété des données.
  • L’agriculture et la sylviculture ont un rôle particulier à jouer dans l’atténuation du changement climatique. Les décideurs politiques devraient s’intéresser plus à la manière d’évaluer le rôle que pourraient jouer les forêts et les cultures permanentes et annuelles en matière d’émissions de gaz à effet de serre.
  • Il convient de promouvoir et d’encourager en amont la participation des agriculteurs aux activités de recherche et d’innovation dans les domaines de l’agriculture, de l’alimentation, de la sylviculture et de l’aquaculture. Leur participation à toutes les étapes des projets permettra d’axer davantage la recherche et l’innovation sur la demande et contribuera à combler le fossé actuel entre la communauté universitaire et les acteurs de terrain, ainsi qu’à trouver des solutions applicables.
  • Le développement de différents types de circuits courts d’approvisionnement alimentaire est l’une des approches préconisées par la politique agricole commune pour améliorer la compétitivité en Europe
Le Collège des Producteurs