Dans le cadre des rendez-vous en Terre agricole organisés dans toute la Province du Hainaut durant le mois de mai, le CREPA-CARAH organisait une séance d’info sur l’adaptation des étables aux changements climatiques. Vu les étés de plus en plus chauds et l’importance que représente l’investissement dans une étable (et la difficulté de l’adapter si elle a été mal pensée), cette séance était l’occasion de présenter le contexte, rappeler quelques fondamentaux et puis prioriser les pistes de solutions dans différentes situations pour avoir un confort des animaux optimal malgré le réchauffement climatique.
La séance a fait intervenir 2 intervenants, Josi Flaba qui a orienté sa présentation sur la ventilation des bâtiments et Benoît Dudant de la Chambre d’Agriculture Nord Pas de Calais qui s’est concentré sur l’adaptation des bâtiments d’élevage aux conditions chaudes.
Le bâtiment d’élevage est un investissement important qui une fois construit sera présent pour de nombreuses années et aura une influence sur de nombreux paramètres de gestion du troupeau, de confort des animaux et d’ergonomie du travail de l’éleveur. Il est donc primordial de bien réfléchir à celui-ci.
Le bâtiment doit à la fois répondre aux besoins du troupeau l’hiver (protection contre le vent, les précipitations et le froid) et l’été (abriter les animaux du soleil et limiter les températures). La ventilation d’un bâtiment est importante car elle permet d’évacuer l’humidité, les germes, les gaz produits par les animaux et leurs effluents ainsi que les poussières par de l’air frais. En hiver il ne faut pas trop refroidir l’étable (surtout pour les veaux plus sensibles aux températures basses) tout en éliminant l’excès d’humidité relative sous peine de jouer avec la santé des animaux et de dégrader plus rapidement le matériel de l’étable. Alors qu’en été il faut maximiser le refroidissement de l’étable pour éviter le stress thermique des animaux qui apparait déjà à 25°C pour les bovins et qui entraine rapidement une baisse de productivité et un inconfort des bovins. Une règle à garder en tête est que le débit de ventilation doit être 10 fois plus important en été qu’en hiver.
Pour une bonne ventilation, il faut bien utiliser la ventilation naturelle assurée par les vents dominants et la poussée thermique au sein de l’étable et éventuellement recourir à de la ventilation dynamique (électrique) lorsque la ventilation naturelle n’est pas suffisante.
La poussée thermique est permise par la différence de température entre le faîte et les ouvertures grâce à la chaleur produite par les animaux. Mais elle n’est pas suffisante dans le cas de bovins et doit être couplée à la poussé du vent. Pour profiter au mieux de cette dernière, la façade en longueur des étables fermées doit être positionnée perpendiculaire au vents dominants (en général SO => NE dans nos régions). La localisation du bâtiment et sa proximité immédiate avec des bâtiments ou des arbres a évidemment aussi son importance. Pour les bâtiments semi-ouverts, la logique est différente, la ventilation étant plus aisée, on va profiter de l’ensoleillement matinal d’hiver (rayons bas et réchauffants) et éviter les vents dominants qui seraient alors trop fort en hiver. Il est donc recommandé d’installer l’étable avec la longueur dans le sens des vents dominants (et donc faisant face au SE). Enfin, pour profiter un maximum des vents en été tout en s’en protégeant en hiver, des systèmes de rideaux ouvrants existent.
Pour l’adaptation de la gestion du troupeau aux fortes chaleurs, Benoît Durant présente les différentes pistes par ordre de priorité ;
- Vérifier les conditions d’abreuvement,
- Mettre à disposition des aliments appétents,
- Offrir de l’ombre aux animaux en pâture,
- Réduire le rayonnement direct et indirect du soleil dans les bâtiments,
- Améliorer la ventilation naturelle,
- Installer une ventilation mécanique (en seconde intention et seulement dans certaines situations),
- Installer la brumisation et/ou le douchage, en dernier recours et avec précaution.
Pour l’abreuvement, il faut compter que les bovins vont boire jusqu’à 2 fois plus d’eau par forte chaleur (jusqu’à 150 L / vache / j). La quantité est importante, la qualité également. Et enfin, la localisation et l’accès aux points d’eau ainsi que les débits de remplissage doivent être pris en compte pour correspondre aux réalités physiologiques des bovins
Les rayons du soleil augmentent la température d’environ 3 °C à l’endroit éclairé pendant l’été. Fournir de l’ombre en prairies et en étable est donc un bon levier pour diminuer le stress thermique. Les translucides sont à éviter. L’isolation de la toiture peut être envisagée dans certaines situations (notamment lorsque la hauteur de toit est plus basse ou pour des lieux stratégiques comme la zone d’attente de traite). Les avancées de toit permettent d’éviter un ensoleillement direct dans un bâtiment pendant l’été tout en permettant au soleil de rentrer en hiver. Des rideaux peuvent permettre aussi quand ils sont fermés d’apporter de l’ombre à l’intérieur du bâtiment. Les niches à veaux sont un point à surveiller pendant l’été, la température pouvant grimper très vite à l’intérieur.
Un point d’attention a été attiré sur les extensions de bâtiments qui doivent être réalisées en tenant compte de la ventilation. Si on vient fermer un bâtiment bien ventilé en y ajoutant une annexe, la ventilation naturelle pourrait être négativement impactée. Lors de l’installation d’un robot de traite, son emplacement doit tenir compte de l’ambiance dans la zone d’installation, celle-ci devant être bien ventilée et pas trop chaude.
Afin d’améliorer la ventilation, l’ouverture des bâtiments en été sur les façades Nord et Est est encouragée. Des systèmes de volets peuvent aussi être installés pour permettre l’ouverture au besoin. Les façades ouvertes se voient de plus en plus dans nos régions. L’ouverture des pignons peut aussi localement être une bonne solution. La présence de maçonnerie et de bêton est négative car elle diminue la ventilation et capte la chaleur du soleil.
Concernant les systèmes de ventilation mécanique, il en existe de différentes formes (ventilateur horizontaux, ventilateurs verticaux, tunnel de ventilation, brumisation). Ceux-ci doivent être envisagés en derniers recours car ils nécessitent un investissement et consomment de l’énergie (coût de fonctionnement). La ventilation mécanique peut s’avérer utile mais nécessite de bien s’équiper (matériel performant et en quantité suffisante, même si la tentation de faire des économies peut être présente…). Pour que la ventilation mécanique soit efficace, le bâtiment doit être suffisamment ouvert. Attention au positionnement et dimensionnement des installations, il faut éviter les effets de regroupement des animaux qui seraient contre-productifs. Vu son coût, la ventilation mécanique peut être raisonnée et priorisée à certains endroits plus stratégiques (vaches taries avant vêlages, zone d’attente de traite, couchages, etc.). La ventilation doit être également bien installée et calibrée avant mise en route par le fournisseur !
Enfin et si toutes les solutions précédentes n’ont pas porté leurs fruits (ce qui n’est pas encore le cas dans nos régions mais pourrait le devenir), des systèmes de brumisation et de douchage existent couplés à de la ventilation. Il faut aussi prendre en compte que ces systèmes apportent de l’humidité dans le bâtiment qu’il faudra faire sortir par la ventilation (naturelle voire mécanique).